Banana Stoba par Shulaika Girigori

Une marmite créole, servie avec une sauce hollandaise

Héritage de la cuisine des esclaves, le Banana Stoba est une recette de Curaçao, traditionnellement cuite sur les braises. Ce ragoût de poulet et de patates douces est nappé d’une sauce à la cannelle et à la banane plantain, et servi avec une garniture de polenta locale : le Funchi.

Recette

PERSONNES

4

TEMPS

3 heures

ORIGINE

Curaçao

Ingrédients

500g. viande de porc salée
3 bananes plantain plutôt mûres
500g. pomme de terre douce
500g. courge
2 cs huile végétale
2 cs beurre
1 oignon
2 tiges de céleri
4 bâtons de cannelle
10 grains de poivre aux cinq baies
10 clous de girofle
1 cs noix de muscade en poudre
Sucre (selon le goût)

Préparation

  1. Détailler la viande en cubes de 5cm de côté et la faire tremper, toute la nuit, au réfrigérateur. Le lendemain, égoutter la viande.
  2. Dans un grand faitout, pocher la viande (démarrage à l’eau froide). Cuire à eau frémissante jusqu’à ce que la viande soit tendre. Réserver la viande et débarrasser l’eau.
  3. Éplucher le plantain et peler les patates douces et la courge. Vider la courge. Détailler l’ensemble de ces légumes en morceaux de 7-8cm de long.
  4. Découper le céleri en tronçons de 2cm.
  5. Tailler l’oignon en rondelles.
  6. Dans une cocotte, chauffer l’huile et le beurre. Sauter l’oignon et le céleri avec les bâtons de cannelle, le poivre, les clous de girofle et la noix de muscade.
  7. Ajouter la viande et recouvrir d’eau. Cuire 10mn.
  8. Ajouter le plantain, la patate douce et la courge. Cuire l’ensemble à feu moyen, jusqu’à ce que les légumes soient cuits.
  9. Si la sauce est trop liquide, retirer les légumes et continuer la réduction jusqu’à ce que la sauce épaississe.
  10. Remettre les légumes dans la cocotte, remuer doucement et rectifier l’assaisonnement en sucre et en sel.

Curaçao

Quelques ingrédients clés

  • 444 km² de superficie
  • 153 000 habitants
  • 2 langues: une bonne dose d’Hollandais & un zeste de Papiamento
  • 1 Devise : Florin des Antilles néerlandaises
  • 1 bon volume de Catholicisme

Les faits importants

  • 1499 — Les Espagnols découvrent Curaçao
  • 1634 — Les Hollandais s’approprient l’île
  • 1658 — Ils y font venir les premiers esclaves africains
  • 1863 — L’esclavage est aboli
  • 2010 — Curaçao obtient son indépendance

À l’origine…

La pomme de terre douce est apparue au Pérou, au Venezuela et en Polynésie, approximativement 8000 ans avant J.C. Du Venezuela, les Arawaks l’exportèrent vers Curaçao. Et depuis la Polynésie, elle s’est exportée vers l’Ouest. D’abord aux Philippines et en Chine, puis en Inde, avant de rejoindre l’Europe. La pomme de terre douce a l’avantage de se conserver facilement et d’être très nutritive. Les Espagnols l’avaient remarqué et l’embarquèrent à bord de leurs galions, pour leurs longues traversées transatlantiques. Ils l’ont ainsi diffusée dans toutes leurs colonies. Les esclaves africains retrouvèrent donc un aliment auquel ils étaient déjà accoutumés.
La pomme de terre douce a ainsi entrepris un tour du monde de 7500 ans, donnant à la route des épices une dimension planétaire et corroborant une idée encore neuve à l’époque : la Terre est bien ronde.

Originaire du Mexique, il y a 10 000 ans, le maïs faisait déjà partie de l’alimentation des Arawaks. Bien plus tard, il représentait une part importante de l’agriculture de Curaçao sous domination hollandaise. Les colons punissaient les esclaves en les obligeant à travailler une journée entière, pieds nus dans les salines. L’action du sel, combinée aux effets du soleil, crevassait leurs pieds en profondeur. Pour se protéger et cicatriser leurs plaies, les esclaves formaient une pâte – le Funchi – à base de farine de maïs et d’eau et l’appliquaient sur la voûte plantaire. Cette préparation représentait aussi leur nourriture de base. Elle n’est d’ailleurs pas sans rappeler le mieliepap d’Afrique du Sud ou du Zimbabwe, l’Oka du Nigeria à base de yam ou le fufu d’Afrique de l’Ouest, au manioc, plantain ou igname.

Le plantain vient de Malaisie et d’Indonésie, pour gagner ensuite l’Afrique. Les Africains avaient compris son intérêt culinaire bien avant les Européens. Les Hollandais ne se servaient d’ailleurs que des feuilles du bananier, pour ombrager leurs cultures alors que les esclaves en consommaient les fruits. La forte teneur en amidon du plantain présente le double avantage d’être une importante source d’énergie mais également un excellent liant pour les sauces des ragoûts. Ce processus de cuisson lente est d’ailleurs très répandu de par le monde. Il permet de concentrer les saveurs, d’attendrir la viande séchée mais aussi de se débarrasser des vers contenus dans celle-ci.

La cannelle est une épice insulaire par définition puisque principalement cultivée à Ceylan, ancienne colonie hollandaise. Elle s’acclimate bien aux Antilles et permet de relever des plats typiquement sucrés.